Séminaire en collaboration avec l’INADES
Les formes institutionnelles de la démocratie diffèrent d’une société à l’autre et ne peuvent être réduites aux modèles occidentaux. La réinvention de la démocratie doit, par conséquent, partir des héritages autochtones, des institution de nos terroirs et des formes endogènes d’organisation de la vie commune. Si, dans le passé, l’exercice du pouvoir dans les terroirs était caractérisé par une forte différenciation institutionnelle, une pluralité d’instances de représentation et de délibération, la coexistence de plusieurs types de hiérarchies et de statuts au sein d’une même communauté politique, qu’en est-il aujourd’hui, à l’ère de la décentralisation et du renforcement des collectivités territoriales?
Par ailleurs, dans l’histoire et les traditions africaines, c’est souvent au niveau local et au sein de petites communautés de base et des associations de proximité qu’avaient lieu les expériences les plus emblématiques de participation directe, de représentation citoyenne élargie, voire de pratiques substantives de la démocratie. C’est aussi à ce niveau que se négociaient le mieux les défis concernant l’accès plus ou moins équitable de tous et de toutes aux moyens d’existence (accès à la terre, à l’eau, aux pâturages et autres moyens de subsistance, etc.).
En raison de leur taille, de leur composition démographique, de la complexité des liens qu’ils entretiennent avec les villes et des capitaux culturels dont ils disposent encore, les milieux ruraux pourraient constituer des terrains privilégiés d’un renouveau potentiel de la participation citoyenne, de la gouvernance décentralisée et in-clusive, et d’une démocratie locale adossée a une économie et a des marchés régionaux. Espaces privilégiés de solidarité (lignagère, clanique ou religieuses), mais aussi de tensions entre genres et générations, les territoires ruraux continuent de jouer un rôle ma-jeur dans la structuration des identités locales et les dynamiques de légitimation du pouvoir. Aujourd’hui, ils sont cependant contraints a des transitions souvent brusques et a des conflits et dislocations de divers ordres qui remettent profondément en question la survie des populations. Ces mutations imposent de repenser les termes d’une gouvernance inclusive et les réquisits d’une démocratie rurale dans le contexte contemporain d’incertitude et d’instabilité.
Afin d’examiner ces questions, le Laboratoire Ouest & Méditerranée organise, du 10 au 12 Mars 2024, un séminaire sur le thème : « Gouvernance inclusive et démocratie rurale ». Le séminaire se tiendra à Lomé (Togo) et réunira une palette d’acteurs et actrices d’ores et déjà engagé.e.s dans la transformation des territoires ruraux: chercheurs et chercheuses, leaders associatifs et communautaires, élites locales, organisations de femmes, autorités traditionnelles, entrepreneurs, chefs religieux, jeunes, ONG etc…
L’objectif du séminaire est d’évaluer, par le biais de dialogues croisés, les possibilités et les limites d’une démocratie rurale durable en Afrique. Partant d’expériences de terrain, l’on tentera d’identifier les conditions d’un possible renouveau citoyen dans les territoires ruraux. Quels sont, dans les héritages locaux, les outils de fonctionnement démocratique, d’expression et de participation qui pourraient être mobilisés en vue de la construction de l’avenir des territoires ruraux ?
L’on prendra en particulier appui sur les politiques de décentralisation et de démocratisation qui ont été adoptées au cours des dernières décennies et l’on en mesurera l’impact politique, économique et culturel. Quels sont les cadres juridiques qui définis-sent aujourd’hui les compétences et les pouvoirs des différents acteurs ruraux (chefs traditionnels, élites locales, associations, classes d’âges, femmes etc.)? Qu’en est-il des droits des femmes (en particulier des droits patrimoniaux comme l’accès à la terre et les droits de succession) et de ceux des “cadets sociaux”?
Une attention spéciale sera accordée aux capitaux culturels et a la façon dont les acteurs locaux les transforment ou non en capacité d’action organisée. Quelles formes de redevabilité inspirent-ils ou rendent-ils possible? Qu’en est-il des espaces publics ruraux et de la vitalité ou du déclin de la vie associative? Quel rôle jouent les élites dans l’articulation des intérêts des communautés rurales? Quelles organisations et individus servent d’intermédiaires entre la sphère politique et les univers de vie des ruraux? Quelles réponses concrètes les communautés apportent-elles aux aléas écologiques et en-vironnementaux et aux autres facteurs d’instabilité qui testent leurs capacités de résilience?
L’analyse, le dialogue et l’échange, ainsi que le partage d’expériences déboucheront sur des propositions opérationnelles suscepti-bles d’être prises en charge dans le cadre des programmes de recherche, de formation et d’appui a des initiatives-phares de la Fondation. Pour celles et ceux qui souhaiteraient participer a ce séminaire, prière de nous contacter a l’adresse suivante : westafrican.lab@innovationdemocratie. org